L’attribution d’un genre aux personnages des livres pour enfants suit rarement une logique universelle. Certaines figures emblématiques défient délibérément les conventions établies, brouillant les codes traditionnels du masculin et du féminin. La littérature jeunesse, tout comme l’industrie du jouet, oscille entre reproduction de stéréotypes et tentatives d’innovation.
Dans ce contexte, la question du genre attribué à Oui-Oui suscite débats et spéculations. Les ouvrages originaux, les adaptations télévisées et les produits dérivés offrent des indices parfois contradictoires, révélant les tensions persistantes autour de la représentation des genres dans l’imaginaire enfantin.
Oui-Oui, miroir des représentations de genre dans la littérature jeunesse
Dans l’univers de la littérature enfantine, Oui-Oui ne ressemble à aucun autre personnage. Imaginé en 1949 par Enid Blyton sous le nom de Noddy, le petit héros à bonnet à grelot s’affranchit des cases toutes faites. Illustré d’abord par Harmsen van der Beek, puis, en France, par Jeanne Hives, Oui-Oui a su traverser les décennies, franchir les frontières et s’imposer sur tous les supports, des albums jeunesse aux dessins animés, sans jamais s’enfermer dans une identité de genre figée.
Oui-Oui défie la catégorisation. Cette indétermination s’exprime dans sa voix, son prénom, ses attitudes. Selon l’édition, l’adaptation ou le doublage, Oui-Oui oscille : présenté parfois comme un garçon, parfois comme un enfant sans genre défini. Même le prénom, dépourvu de marqueur masculin ou féminin, entretient le doute : aucune caractéristique ne vient trancher, ni à l’écrit ni à l’oral.
Créateur | Illustrateurs | Éditeur | Ville |
---|---|---|---|
Enid Blyton | Harmsen van der Beek, Jeanne Hives | Hachette | Miniville |
Dans certains pays, prénom et genre de Oui-Oui se transforment : Zvonko, Nicke, Lelumaan Niksu. Cette souplesse permet à chaque enfant de façonner Oui-Oui à son image, d’y projeter sa sensibilité propre. L’absence de position officielle sur le genre du personnage, même chez Hachette, laisse le champ libre à toutes les interprétations.
En occupant une place centrale dans la culture enfantine, Oui-Oui interroge la façon dont les modèles proposés agissent sur l’identification des jeunes lecteurs. Albums, séries, jouets deviennent alors autant d’espaces où la question du genre se redéfinit, évolue, s’ajuste au fil des cultures et des générations.
Quels indices sur le genre de Oui-Oui dans les livres et dessins animés ?
Dans les albums jeunesse et les dessins animés, l’identité de Oui-Oui intrigue et interpelle. Le genre du personnage traverse les époques sans jamais se fixer. Tout semble participer à ce maintien du flou, des dialogues aux vêtements en passant par le choix du prénom.
La voix française, fréquemment assurée par une comédienne, joue sur l’ambiguïté. Les textes d’Enid Blyton ne donnent pas de réponse définitive. Le costume non plus : short, pull rouge, bonnet à grelot, rien n’indique clairement une appartenance à un genre. Même le décor de Miniville s’écarte des différenciations habituelles. Dans la langue originale, Noddy n’est jamais assigné ni au masculin ni au féminin.
Quelques éléments permettent de mesurer cette indétermination :
- Prénom : Oui-Oui ne porte aucune marque de genre. Les registres officiels évitent de le classer d’un côté ou de l’autre.
- Adaptations étrangères : chaque pays adapte librement le prénom et le genre du personnage : Zvonko, Nicke, Lelumaan Niksu, parfois au masculin, parfois sans indication précise.
- Dialogues et pronoms : en France, Oui-Oui est le plus souvent désigné au masculin, mais sans insistance. Les situations du quotidien, conduire son taxi, jouer, aider les habitants, se déroulent sans jamais mettre en avant un rôle genré.
Ce choix narratif laisse le public libre d’interpréter. Filles et garçons trouvent dans ce héros-enfant un miroir possible, un espace où l’identification ne dépend plus du genre. Oui-Oui devient alors le support d’une projection individuelle, ouverte et multiple.
Stéréotypes et influences : quel impact sur la perception des enfants ?
La question du genre dans les albums jeunesse et les dessins animés, illustrée par Oui-Oui, va bien au-delà d’une simple curiosité. Elle touche à ce que les histoires, jouets ou programmes transmettent, souvent sans même que l’on s’en rende compte. Les mondes proposés aux enfants ne sont jamais neutres : ils véhiculent des modèles, parfois rigides, parfois plus nuancés.
Le Haut Conseil à l’Égalité (HCE) souligne la persistance des stéréotypes de genre dans les jouets, les récits, les catalogues. Les univers « fille » et « garçon » restent largement séparés, aussi bien dans les magasins que sur les écrans. Pourtant, l’ambiguïté de Oui-Oui offre un souffle différent. Ce personnage sans étiquette permet à chaque enfant de s’identifier selon sa propre sensibilité, sans assignation stricte. Chacun peut prêter à Oui-Oui ses désirs, ses qualités, ses rêves, sans que l’histoire ne vienne borner son imagination.
Certains enseignants s’appuient sur cette particularité. Oui-Oui devient alors une ressource pédagogique, un point de départ pour questionner les frontières du masculin et du féminin. Ces temps d’échange sont l’occasion d’aborder l’égalité filles-garçons, de discuter des normes, des différences, du respect de chacun.
Du côté des familles, chacun interprète à sa façon. Pour certains, Oui-Oui serait un garçon ; pour d’autres, une figure universelle. Ce flottement voulu par Enid Blyton, puis entretenu au fil des adaptations, contribue à remettre en question les repères habituels. La mixité, la liberté d’identification, la variété des jeux et des histoires gagnent du terrain dans l’univers de l’enfance.
Vers une lecture plus critique des modèles proposés aux plus jeunes
L’univers de Oui-Oui pousse à s’interroger sur les références transmises dès le plus jeune âge. La diversité des interprétations qui entourent ce personnage, et la pluralité de ses adaptations, mettent en lumière la question de la mixité et de la représentation filles-garçons dans la littérature jeunesse. S’appuyant sur des outils validés, les enseignants utilisent ce flou pour inviter à la réflexion sur les normes de genre.
Dans les classes, Oui-Oui sert de point d’appui pour décortiquer les codes transmis par les albums, les dessins animés ou les jouets. Cette démarche, loin de se limiter à Miniville, s’inscrit dans une recherche de diversité et d’égalité des modèles proposés aux jeunes lecteurs. Plusieurs ressources recommandées par les institutions publiques montrent comment, face à des héros ambigus, les enfants s’autorisent à inventer leur propre place, à sortir progressivement des frontières d’hier.
Voici quelques axes qui émergent de cette dynamique :
- Mixité : Des enseignes qui s’engagent à travers des chartes pour une représentation plus équilibrée dans l’univers des enfants.
- Égalité filles-garçons : Les démarches pédagogiques s’appuient sur des exemples concrets, tel Oui-Oui, pour remettre en question les stéréotypes.
- Rôle des adultes : Parents et enseignants sont sollicités pour accompagner ce regard critique sur les personnages, aussi bien à l’école qu’à la maison.
En ouvrant la porte à des personnages aux contours mouvants, la littérature jeunesse enrichit les imaginaires. Oui-Oui, qu’on le voie comme garçon, fille ou figure universelle, invite à repousser les limites, à réinventer la mixité et à agrandir le champ des possibles pour chaque enfant en quête de soi.